Quand j'étais enfant, j'avais l'habitude de partir dans notre maison de campagne. Une petite chaumière aux briques rouges datant du 19ème siècle. Son grand terrain était pour moi, mon univers d'aventure. Mais en ce 9 août 2006, je ne me rendais pas dans la petite maison dans la prairie. J'allais chez un ami de mes parents que je ne connaissais guère.
Je m'en souviens très bien... Je devais avoir 6 ans, trimballant ma poupée blonde habillée d'une robe rose. J'avais grimacé devant la vue de cet horrible manoir violet. Il faisait deux étages, était vieux à être démoli et les fenêtres semblaient vouloir me dévorer du regard.
Une fois sur place, on m'avait dit d'aller m'amuser ailleurs. Je boudais fermement, mes parents voulaient toujours m'exclure de leurs conversations d'adultes.
Alors, j'étais allée marcher dans les étages d'un pas râleur, ma poupée était serrée autour de mes bras. Jusqu'à cette découverte... Mes pas m'avaient guidé au deuxième étage, sur une vieille porte verte... Intriguée, malicieuse, je l'avais ouverte comme attirée par ses secrets.
À peine avais-je posé le pied dans cette pièce sombre que j'avais sursauté, la porte s'était refermée. La luminosité était arrivée lentement et mon regard s'était promené sur la composition de cette pièce étrange.
Qu'elle n'était pas ma surprise devant cette incroyable visite ! La salle était un immense jardin de la taille d'une chambre : des plantes grimpaient, des fleurs bourgeonnaient, le sol était de l'herbe verte, le plafond ressemblait à une serre. Au centre, j'apercevais un arbre avec une pomme bleue claire aussi transparente que du verre.
Enfant, on était poussé par la curiosité, je m'étais approchée au milieu des tulipes et j'avais récupéré la pomme dans ma petite main, elle semblait unique autour de ces plantes venues d'autres pays. Enfant, on était un peu bête, je l'avais mangé pour savoir le goût qu'elle aurait.
La pièce a tourné, tourné, tourné, j'étais pétrifiée, les mimosas se mélangeaient aux bambous, les fraisiers aux fougères... Tout a disparu, il ne restait qu'une jeune fille et un piano dans un brouillard mi-épais. Les cheveux blonds de la fille étaient aussi beaux que sa robe bleue cristalline. Son visage était blanc comme de la neige et ses yeux ne s'ouvraient pas, fermés dans un repos éternel.
"Maman aime quand je chante." Disait-elle.
"Papa aime quand je cuisine." Chantait-elle.
"Moi, j'aimerais être un chat au soleil."
"Et toi ? Que veux-tu être ?"
"Je ne sais pas !" Lui répondais-je comme hypnotisée par sa voix.
"Alors, viens jouer avec moi".
Malgré la situation étrange, je voulais m'amuser avec cette nouvelle amie. Courageuse, j'avance au travers du brouillard gelé pour m'asseoir près de l'inconnue.
"Comment tu t'appelles ?" Demandais-je.
"Isabelle."
Elle laissait glisser ses doigts sur le piano pendant que je la regardais.
"Je ne sais pas jouer du piano." Lui indiquais-je nerveuse.
Elle avait lâché un rire cristallin et m'invitait à poser mes mains. Maladroite, je pianotais au hasard sur les grandes touches blanches. Je me sentais tendue, je voulais impressionner ma nouvelle amie. Elle semblait neutre face à mes mains tremblantes, elle continuait d'imaginer une musique harmonieuse, aussi douce que le son d'une rivière. Alors, je l'avais suivi en jetant un œil à la tapisserie rouge, et sans savoir comment ma mélodie était aussi belle que la sienne. Je laissais le froid, la mélancolie, l'affection, cette douce brise, tout dans cette salle si petite m'emporter.
Je fermais les yeux à mon tour, mes cheveux volants aussi vite que les notes au bout de mes doigts. Je sentais l'amour de mes parents, l'amusement pour des jeux inconnus, la sensation enivrante des ballades, le bien-être que pouvait m'offrir le monde. Mais après, je sentais le rythme de mes doigts ralentir, l'instrument chantait en grave. Mon corps éprouvait la nostalgie, la douleur, le supplice, et enfin, la peur qui me nouait au ventre pour remonter en larmes sur mes joues frêles.
La musique venait de s'arrêter.
La pluie tombait sur ma poupée.
La jeune fille avait la tête tournée vers moi.
"Ne les laisse pas te briser."
Je me suis ensuite réveillée dans le couloir, avec le goût d'avoir vécu un long rêve. La porte et les sensations qui m'ont envahi avaient disparu.
Est-ce que tout cela était vraiment réel ?
Il était tard ! J'avais replacé mes vêtements pour ne pas qu'on remarque mes bleus, ma frange cachait une longue cicatrice sur mon front. Je devais rejoindre papa et maman avant de me faire encore gronder.
Depuis, je n'ai plus jamais revu la pièce secrète ou cette étrange fille. Elle avait été, pour un court instant et encore aujourd'hui, une grande amie. En quelque sorte, tu m'avais sauvé la vie.
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