ENCORE… ENCORE… ET ENCORE. JAMAIS CELA NE POURRA S’ARRÊTER DE LUI-MÊME. Jamais je ne pourrais sortir de cette maudite pièce exiguë, froide, humide et poussiéreuse dans laquelle il m’avait enfermée… dans laquelle il me séquestrait depuis maintenant plusieurs mois sans avoir aucune visite, sans que je ne puisse voir la vraie lumière du jour autrement que par cette minuscule fenêtre. Jamais je ne sortirais de ce sous-sol, de cette «prison inhumaine». J’étais fermement enchainée comme un animal pour empêcher toute fuite possible. Jamais je ne se cesserais de souffrir entre ses vieilles mains sales et perverses qui me répugnaient énormément. Jamais. Bordel !! Non… Non… Non… Non… J’avais réellement envie de mourir. J'avais réellement envie de quitter ce monde. Chaque jour que je passais ici était pire que de vivre un véritable enfer. Allongée avec nonchalance (c’est-à-dire comme je le pouvais) sur mon lit de fortune, un vieux matelas troué et surtout moisi, je me nourrissais du peu de nourriture qu’il avait bien voulu me donner le soir d’avant, un maigre repas composé d’un verre d’eau fade et d’une de ces bouillies infâmes qui me restait constamment sur l’estomac. De plus, j’avais dû mal à avaler cette mixture presque verdâtre et surtout dégoutante tellement ma gorge me faisait mal… affreusement mal même, tout comme le reste de mon misérable corps amaigri par le temps qui défilait irrémédiablement dans cet endroit… un corps dont je n’arrivais presque pas à bouger les muscles. La douleur abominable de ce dernier était – elle aussi – horrible et insupportable. Mes côtes… mon ventre… mes bras… mes jambes… mon dos… toutes ses parties dénudées de mon anatomie étaient couvertes d’ecchymoses ainsi que de très nombreuses brûlures, de coupures et de lacérations plus ou moins profondes. Probablement avais-je des os de cassés. Comment cela était-il possible n’est-ce pas? Dites cela à mon psychopathe de bourreau… à mon tortionnaire. Depuis la mort brutale de ma mère décédée d’une maladie rare depuis quelque temps (elle nous avait quitté seulement quelques jours après la naissance de mon frère Téo), il était devenu un véritable monstre inhumain qui ne cessait de boire comme un trou pour faire passer son «soi-disant» chagrin… pour faire passer son « soi-disant » deuil… qui ne cessait de consommer n’importe quel type de drogue pour se « sentir mieux ». De plus, il était prêt à tout pour me détruire physiquement et mentalement, pour me rendre dans un état vraiment très proche de la mort afin de faire de moi ce dont il avait envie et comme il me droguait constamment, j’étais complètement inerte à pouvoir me défendre. Heureusement qu’il tenait trop à mon héritage familial pour tenter d’en vouloir à ma vie qui lui importait peu.
Du moins
pour le moment.
Cependant, je savais pertinemment que
la dure réalité me rattraperait tôt ou tard et que contre toute attente,
l'enfer de cette pièce serait à jamais mon tombeau… mon cercueil.
Régurgitant péniblement mon
«repas» à coté de mon matelas (comme à chaque fois d’ailleurs), mon
corps tressauta machinalement par simple réflexe dès que j’entendis le verrou
de la porte s’enclencher. La vieille porte en bois grinça et s’ouvrit sans pour
autant se refermer alors que des pas lourds résonnèrent jusqu’à descendre les
nombreuses marches qui menèrent à moi. Tremblant de tous mes membres en
retenant maladroitement ma respiration, je m’étais recroquevillée négligemment
sur moi-même en m’enfonçant le plus possible contre le mur de ma cellule malgré
l’enchainement de mes poignets et de mes chevilles par des chaines épaisses et
rouillées. La peur me paralysait entièrement tandis que l’effroi me glaça
littéralement le sang. Le silence pesant qui s’en suivis m’effrayait encore
davantage. Malheureusement, la «paix» était de très courte durée. Un
cri aiguë de douleur s’échappa de mes lèvres gercées et fendues quand une main
puissante vint d’agripper ma chevelure rousse en bataille pour me faire relever
ma tête jusqu’à m’en tordre littéralement le cou. Mon regard bleu s’encra alors
dans un regard blafard de couleur vert.
Mon tortionnaire.
Mon bourreau.
Mon géniteur.
Mon père.
Et c’est ainsi que je compris
immédiatement. Une nouvelle journée se terminait pour moi, la nuit était déjà
tombée, donc j’en déduisis qu’on était le déjà le soir. Je compris aussi que
cela allait se reproduire de nouveau comme un rituel quotidien… je compris que
cela ne présageait rien de bon… que si mon psychopathe de géniteur était descendu
une fois encore dans le sous-sol exiguë c’est que j’allais de nouveau souffrir
entre ses mains rugueuses pour son plaisir malsain. Pour lui, je remplaçais la
défunte femme qui m’avait mise au monde. Il avait profité de cette perte
insoutenable… de ma faiblesse… de mon deuil pour me manipuler comme une
marionnette. J'étais désormais sa propriété exclusive, j’étais sa poupée de chiffon, j’étais son jouet et lui seul se donnait le
droit de me voir entièrement nue… se gardait le droit de pouvoir me toucher (ou
de caresser chaque fois mon corps frêle vulnérable) … le droit de m'attacher… le
droit de lever plus que la main pour me frapper durement pour me corriger avec
sévérité… le droit de me rabaisser tel une merde inutile, une moins que rien…
Comment
pouvais-je être une adolescente épanouie en vivant ce calvaire depuis trop
longtemps ?
Impossible. Il était trop tard pour revenir
en arrière.
-
Sois sage ma belle, il me disait en caressant ma joue pour
m’obliger à faire acte de silence.
-
Non… pas encore… je ne veux pas… lâche-moi…
Ne… ne me touche pas… je couinais
d’une voix tremblante et apeurée en me débattant quelque peu.
- Très bien… je vois que cela n’a pas encore fait son effet… quel dommage…
Il y eu un moment flippant de
silence. Je n’aurai jamais dû lui répondre. Il n’aimait pas ça que je me
comporte comme une gamine désobéissante. Il préférait mon silence signe de
soumission à son égard. Relâchant ensuite son étreinte de ma chevelure
flamboyante devenue crasseuse, je subis aussitôt – et rapidement – de nouveaux
coups de pieds d'une ampleur sans précédent. J’en avais le souffle temporairement
coupé. Les différents chocs qu’il me donnaient me propulsais contre le mur en
brique derrière moi. Ma colonne vertébrale semblait se rompre alors que ma tête
bourdonnait dangereusement, elle tambourinait constamment comme si l’on me
frappait longuement avec un marteau. C’était insupportable. Je sentais un
liquide chaud couler en un mince filet le long de ma tempe.
Mon sang émergeait d’une plaie ouverte ou
probablement rouverte.
-
QUAND APPRENDRAS-TU À TE TAIRE ET À OBÉIR SALE PETITE INGRATE?? Il se mettait à crier en réitérant
ses coups avec encore plus de violence.
-
Arrête… s’il te plait… je le suppliais difficilement en
ayant les larmes aux yeux.
-
NE ME DONNE PAS D’ORDRE!!
Agrippant fermement ma nuque d'une
main avec ses doigts, il me plaquait durement contre la surface froide et
rappeuse que je heurtais de nouveau sans aucune douceur. Un nouveau cri –
étouffé par mes quelques sanglots – s’échappa à travers mes lèvres entrouvertes,
lèvres dont il s’empara presque aussitôt avec brutalité, sa langue fouillant
contentieusement ma bouche contre mon gré. Son haleine empestait grandement
l’alcool et le mélange de tabac froid. De violents hauts le cœur me prit alors
que mon corps tremblait énormément. Pas encore!! Non… pas encore… Non… Sa
main de libre, elle, se mettait à parcourir librement et avec empressement mon
corps partiellement nu et ses phalanges grasses s’aventurèrent alors sur mon
cou à découvert puis vinrent compresser dans sa paume rugueuse ma poitrine
ronde et généreuse protégée par un semblant de soutien-gorge dont il cherchait
à agacer les pointes (sans grand succès tellement j’en étais dégoutée) avant de
subitement descendre plus bas le long de ma hanche pour caresser mon ventre,
mon nombril et cela, jusqu’à atteindre inexorablement l’intérieur de mes jambes
resserrées entre elles. Refermant fermement ses doigts sur ce morceau de chaire
qu’est ma cuisse, il sépara brusquement mes membres inférieurs. Son touché me répugna
irrémédiablement. Mon 1er réflexe – comme à chaque fois que cela m’était
possible – étais alors de lui mordre sans aucune douceur sa lèvre inférieure
jusqu’au sang, malgré les conséquences de mon acte déraisonné. Je le savais
mais je ne voulais pas qu'il touche à mon intimité… à mon jardin secret.
Ma virginité
ne le lui appartenait absolument pas.
Il me lâcha subitement et fit un pas
en arrière en grognant de mécontentement tout en passant la manche de son pull
crasseux sur sa bouche d’où s’échappa un peu de sang. Une gifle s’abattit ensuite
d’emblée sur mon visage. Je lui jetai un rapide regard suite à quoi je crus défaillir
sans pouvoir réellement déglutir lorsque je le vis sortir ce même vieux trousseau
de clés de la poche arrière de son jean troué complètement taché de diverses
substances, après quoi il détacha soigneusement mes poignets et mes chevilles marquées,
endoloris et surtout ensanglantés – à force de tirer dessus comme une malade ou
une hystérique – avant d’être littéralement jeter sur le vieux matelas comme un
objet. Atterrissant négligemment sur le ventre, il me bloqua irrémédiablement avec
force en écrasant l’un de ses pieds sur mon dos.
-
Voilà une idée bien stupide jeune
fille, il m’annonça
en appuyant d’avantage le poids de son corps sur le mien. Je vais devoir corriger une fois encore ton insolence. Bien… bien…
bien… comment vais-je devoir te punir petite impertinente? Il me
demanda ensuite en faisant longuement mine de réfléchir.
Mes sanglots qui ne s’étaient pas
encore vraiment taris reprirent de plus belle alors que je le suppliais d'une
voix tremblante de me lâcher et ne rien me faire. Là, c'est comme si vous
parliez à un être humain atteint de surdité. Cet homme était toujours autant
aveuglé par la colère, la rage et la haine qui ne cessèrent de l'habiter et le ronger
de l’intérieur. Cela le dévorait tellement qu'il se défoulait librement sur moi
et mon corps frêle. Comme maintenant. Pour lui me corriger, c’est me punir pour
m'humilier de la pire des manières possibles. De plus, il savait pertinemment
comment il voulait faire pour me remettre à ma juste place de «petite
fille», tout comme il savait ce que l’attente de la sentence
«punitive» provoquait psychologiquement sur mon organisme affaibli.
J’avais beau le savoir depuis longtemps, je n’avais pas d’autres possibilités
que de subir contre mon gré. Je n’avais pas le choix. Je n’étais pas libre de
mes choix. Rares sont les fois où j’avais pu y échapper car il était trop soûl
pour venir me voir ou bien il dormait. Aussitôt je sortis brusquement de mes
pensées et mon corps se figea de nouveau quand un bruit si particulièrement
commun attire mon attention. Le bruit plus que distinctif d’une boucle de
ceinture en cuir que l'on détacha et retira de son vêtement.
Oh non, il n’enlevait
pas son pantalon… enfin pas cette fois-ci du moins… juste la ceinture.
-
Lève-toi! M’ordonna-t-il durement de sa voix
alcoolisée.
Sans même lui jeter un seul regard,
mes yeux s’étaient écarquillés de peur… non… pas de peur… mais plutôt de terreur,
une terreur récurrente qui faisait davantage trembler mon corps et me paralysais
complètement. Elle m’empêchait de bouger. Un autre grognement de mécontentement
résonna alors dans cette pièce sale et exiguë… puis un coup de ceinture vint
claquer sèchement sur le sol à seulement quelques centimètres de mon visage. Un
cri caractérisant ma peur sortit du fond de ma gorge. Je me mis à reculer contre
le mur le plus proche et roula spontanément en boule comme pour me protéger maladroitement
du prochain coup à venir.
-
Je ne me répéterais pas, lève-toi immédiatement
ou bien le prochain coup de cuir sera pour ton joli visage de poupée, gronda-t-il fortement sans bouger
d’un pouce. As-tu bien compris?
-
… oui… j’énonça difficilement tel un
murmure pourtant presque inaudible.
Déglutissant encore avec peine, je fis
abstraction à tant d’équations diverses pour pourvoir me lever un minimum…
j’ignora la douleur qui broyais chaque parcelle de mon anatomie tout comme j’ignora
la terreur qui circulait inlassablement dans chacun de mes nerfs qui étaient
connectés à mon cerveau dont les fonctions essentielles en étaient irrémédiablement
amoindries psychologiquement parlant. J’étais littéralement une épave sans vie…
sans aucune émotion quelconque. Un vulgaire pantin. Une simple marionnette
désarticulée. Après un certain temps à essayer de me redresser avec énormément
de difficulté, j’étais enfin debout sur mes deux jambes nues vacillantes tout
en m’appuyant avec nonchalance contre le mur le plus proche. Que voulait-il de moi maintenant? Me
battre à mort? Me fouetter jusqu’au sang? Je savais que cela n’annonçait
réellement rien de bon pour moi. Je vivais continuellement avec la souffrance
sans jamais m’en échapper. Cette dernière s’enracinait de plus en plus dans mon
être tel une maudite boucle infernale sans fin. D’un œil émeraude inquisiteur,
je le regardais succinctement. Un sourire dès plus malsain se dessina presque
instantanément sur ses lèvres tandis que l’objet de sa punition était fermement
enroulé dans sa grande main musclée.
-
Tourne-toi face au muret
pose tes mains dessus!
Hoquetant de peur, j’obéissais sans bronchée
et me tourna en tendant les bras pour que mes doigts touchent la surface froide
et poussiéreuse, m’obligeant ainsi volontairement à courber le dos pour faire
ressortir mon fessier… puis j’attendais en cogitant de plus belle. Le défier signerai
automatiquement mon arrêt de mort. Ça aussi je le savais.
-
Parfait… ne bouge plus… ta
correction n’en sera que plus «douce» à supporter. Annonça-t-il en ricanant légèrement
tout en venant caresser lentement la courbure de mon dos qui se couvrit de
frissons. Comme à chaque fois, tu auras le
droit à 30 coups sur ton dos et 15 sur chacune de tes jambes… coups que tu
devras bien évidemment compter et si tu viens à tomber je recommencerais du
début. Ai-je été assez clair pour toi jeune fille?
-
Oui… oui tu l’as largement été…
Clac! Le 1er coup de la ceinture en cuir extrêmement violent
n’avait pas tardé à s’abattre sur mon corps faiblement vêtu. Un cri de douleur déchirant
naquit du plus profond de ma gorge à travers la pièce vide. La violence de cet impact
si soudain me donnait l’impression que ma peau tout entière se déchirait en
lambeau.
-
1… m’étais-je mise machinalement à
compter alors qu’une nouvelle larme coula sur ma joue.
-
Bien.
Clac! Le 2e coup arriva presque aussitôt en quelques secondes,
il avait une forte intensité identique à celui du premier. Un 2ème
cri perça mes cordes vocales tandis que mes doigts se crispèrent sur le mur.
-
2… continuais-je d’énumérer en grimaçant de
douleur.
-
Bien.
Clac! 3… Clac! 4… Clac! 5…
Clac! 6… Clac! 7… Clac! 8… Clac! 9… Clac! 10…
Clac! 11… Clac! 12…
Les coups violents - qui s’alternèrent
parfois avec mes jambes - ne cessèrent aucunement de pleuvoir inlassablement
sur mon corps déjà meurtris des dernières corrections qu’il m’avait affligée
les jours d'avant. Je les endurais et les comptais, un par un en criant jusqu’à
m’en déchirer les cordes vocales ou mordant sans répit ma lèvre inférieure… allant
même jusqu’à griffer fermement jusqu’au sang le mur pour m’empêcher de flancher,
pour m’empêcher de m’évanouir sous la pression de la fatigue et de son
acharnement à vouloir entièrement me briser. Mais voilà… chaque personne n’est
pas infaillible pour autant, chaque personne à ses propres limites. Et je venais
bien évidemment d’atteindre les miennes. Au 25e coup consécutif sur
mon dos (et seulement le 10e sur l’ensemble de mes deux jambes), mon
corps ne m’écouta plus et me lâcha subitement. Mes jambes cédèrent et je
m’étais mise à vaciller avec nonchalance, chutant ainsi lourdement sur le sol
goudronné.
-
Décidemment, tu as beau être ma
fille unique, tu es incontestablement trop faible… une véritable incapable, il me jugea en s’accroupissant à
ma hauteur tout en agrippant brusquement ma chevelure flamboyante alors que je
peinais à garder les yeux parfaitement ouverts. Tu es comme ta maudite mère, un déchet complètement inutile… sauf pour
me rapporter de l’argent facilement. Et comme je n’ai pas pu terminer ta «punition»,
je vais donc devoir m’y prendre autrement pour parfaire ton éducation.
Quoi?
Non! Non… pitié… pas ça. Pas encore. Je ne veux pas revivre cela. Tout
mais pas ceci. Que quelqu’un me vienne en aide… Pitié… aidez-moi!!
Aidez-moi! Aidez-moi!
Agrippant fermement de mes mains une
sorte de tissus très doux, je hurle à m’en déchirer les cordes vocales et je
pleure sans pouvoir m’arrêter. Toutes mes larmes coulent en revivant
éternellement ces horribles cauchemars… ces souvenirs douloureux de mon passé
qui viennent constamment hantés chacune de mes nuits. Après quoi brusquement,
je me réveille de mon état de sommeil profond complètement trempée de sueur en
poussant un autre cri plaintif de terreur. Déboussolée et terrorisée, je n’ai
pas le temps de m'habituer à l’environnement qui m’entoure que la porte s’ouvre
soudainement. De grandes ombres noires et blanches entrent rapidement dans la
pièce où je me trouve. Trop rapidement même car je n’arrive pas à distinguer
leurs visages floutés malgré la lumière artificielle qui vient éclairer violemment
mon environnement. Ces ombres géantes, elles me font peur… très peur. Voulant
immédiatement reculer, je tombe négligemment sur le sol en couinant de douleur
pour ensuite m’en éloigner et de nouveau je me suis mise à hurler pour qu’elles
quittent la pièce. Je veux qu’elles disparaissent. Pourtant, elles restent là… elles
restent immobiles… elles m’entourent et m'encerclent… elles semblent me parler…
elles semblent m’appeler mais je n'entends rien. Ce sont comme des bruissements
de feuilles mortes sur lesquelles on marche en automne… comme de faibles échos
portés par le vent extérieur. Puis plusieurs d'entre elles tendent leur main vers
moi. Presque instantanément je réplique. Je les repousse, je les insulte, je les
mord ou je les griffe car je ne souhaite aucunement que l'on me touche et
encore moins que l'on me pique avec des aiguilles contenant un liquide bizarre
et inconnu qui me fait à chaque fois dormir.
-
Que se passe-t-il ici?
À la suite de quoi, un étrange
silence à la fois calme et oppressant vient se succéder à la voix masculine qui
fait vite autorité dans ce lieu limite lugubre pour moi… lieu d'où émane en
permanence dans l'air ambiant une odeur de propre, une odeur typique de
désinfectants – semblable à celui de l’eau de javel – et de multiples médicaments.
Plus aucune de ces ombres n’ouvrent la bouche ou esquissent un simple
mouvement. Personne n’ose répondre en sa présence. Mais dès lors que ses yeux
se posent irrémédiablement sur moi, il comprend, il comprend que j’ai
recommencé une violente crise d’angoisse.
-
*Soupir* Bande d’idiots… murmure-t-il plus pour
lui-même, ne voyez-vous donc pas que vous
lui faites peur... Que tout le monde sorte! MAINTENANT!! Gronde-t-il
assez froidement.
Comme d’un commun d’accord, tous
hochent la tête et quittent la pièce aussi rapidement qu’ils sont venus. Il ne
reste plus que lui qui m’observe avec autant d'attention et moi qui pleure et
tremble encore énormément dans mon coin. Mes yeux bleus ne le lâchant pas. Tout
en restant très prudent dans ses gestes, ce même homme vêtu d’une blouse
blanche – caractéristique d’un centre hospitalier ou bien celle d’une clinique
– avance et s’agenouille lentement pour être à ma hauteur. Avec douceur, il tend
sa main qui vient délicatement effleurer ma joue afin de la caresser avec
tendresse en même temps que son pouce essuie les larmes qui ont coulés. Petit à
petit, son geste doux tout comme les mots qu'ils prononcent ont un effet apaisant
sur mon organisme et cela arrive à me détendre, à me calmer. Mes tremblements
cessent tandis que mon regard vert est toujours posé sur lui. Son visage m’est
en quelque sorte familier sans pour autant que je puisse me souvenir de son
prénom qui ne comporte que trois des lettres de l’alphabet… je ne me souviens
que très vaguement que c’est le plus jeune médecin en chef de cet hôpital privé,
celui qui me prend en charge depuis le 1er jour de mon admission ici
et me rend régulièrement visite après chacune de ses consultations à
l’extérieur.
Puis subitement, il me prend dans ses bras et me caresse affectueusement le dos.
Mon visage se niche instinctivement contre
son torse.
-
Voilà, calme-toi. Tu ne crains rien ici.
Tu es en sécurité,
continue-t-il de me rassurer.
-
Je suis… où? Comment suis-je
arrivée ici? Je demande craintive
sans pour autant relever ma tête toujours installée contre son torse.
-
Tu ne te souviens pas? Il me demande passablement surpris.
Je secoue la tête pour lui faire
comprendre que non. Et à vrai dire, en dehors des « visites » de cet homme plus
que charmant et attentionné dans ma chambre pour faire mes nombreux soins
requis, je ne me souviens pas beaucoup des évènements qui ont suivi mon arrivée
dans ce bâtiment et dans cette pièce. Tout est vague, flou. Comme si mon
subconscient ne voulait pas que je m’en souvienne. Alors il m’explique par des
mots simples – de sa voix douce et rassurante – ce qui m’est arrivée… jamais je
n’aurai pensé être en ces lieux depuis aussi longtemps.
-
Tu as été admise en urgence dans cet
hôpital privé depuis bientôt une semaine. Tu étais dans un état très grave
quand on t’a amenée ici… un état qui a dû grandement s'empirer avec cet accident.
Voyant que je ne bouge pas malgré le
minimum d’explication qu’il me donne, l’homme continue à me parler calmement en
me posant quelques questions tout en surveillant le moindre de mes gestes… la
moindre de mes réactions, probablement de peur que je ne vienne à rechuter avec
tout ce qui j’ai pu vivre jusque-là entre les mains de mon géniteur.
-
Quel est ton nom?
-
Cela ne vous regarde pas… je lâche en me refermant sur
moi-même par manque de confiance envers cet homme.
-
Je vois… dit-il visiblement déçu. Malgré tout, tu es une ravissante
demoiselle.
Mon humeur et ma gestuelle sont toutefois
changeante puisque n’ayant pas l’habitude d’être ainsi complimenté, je me suis aussitôt
mise à enfouir un peu plus mon visage devenu cramoisi contre lui tout en
agrippant fermement sa blouse blanche avec mes mains, ce qui le fait légèrement
rire, augmentant ainsi davantage ma gêne. À la suite de quoi, sans même me
prévenir, il me soulève du sol glacé – tel un poids plume – sans aucune
difficulté pour me porter dans ses bras. Me tenant plus fermement à son vêtement, ce
dernier me dépose tranquillement sur mon lit afin de m’y asseoir.
-
Quel âge as-tu?
-
17 ans ½…
-
Tu es si jeune et tellement… craintive, murmure-t-il peiné tout en soupirant,
comme s’il regrettait à l’avance ce qu’il pourrait dire. Dis-moi ma belle... qui a bien pu te faire autant de mal? Qui a
bien pu te faire toutes ces blessures?
À
peine a-t-il terminé de prononcer sa dernière phrase que mon comportement change
de nouveau et de façon radicale, à la suite de quoi je le lâche subitement et
me recule brusquement pour m’éloigner de lui. Puis instinctivement, mon corps
tout entier se met de nouveau à trembler et ma respiration se blogue irrémédiablement
alors que silencieusement, des larmes recommencent à couler de plus belle.
-
De quoi voulez-vous parler?
Je sais pertinemment où il souhaite
en venir juste avec ces deux questions. Seulement, je ne voulais absolument pas
parler de ça… en parler reviendrai à
revivre intégralement tout cet enfer… à revivre les quatre années de ma vie que
j’ai passé à être enchaînée et violentée par mon bourreau et géniteur dans
cette cave humide et poussiéreuse sans personne pour venir m’aider à chacun de
ces instants éprouvants. Alors plutôt que d’affirmer haut et fort cette
réalité, je préfère la nier complétement.
-
Comme tu le sais probablement, je
suis médecin et certains signes visibles ne trompent pas tout comme je sais en
l’occurrence que même un accident de voiture comme celui-ci ne fait pas autant
de dégâts sur le corps d’une adolescente comme toi.
-
Et où souhaitez-vous en venir? Je lui demande d’une voix mal
assurée.
-
Les marques de strangulation… les
côtes cassées… les ecchymoses… les marques de fer qui contournent tes chevilles
et tes poignets et toutes ces lacérations plus ou moins profondes dans ton dos
et sur tes jambes… Tu as subi des violences physiques n’est-cepas ? Me demande-t-il avec douceur.
Malheureusement pour lui, je reste
totalement muette à ses propos,
-
Je ne te forcerai pas à en parler si
tu ne le souhaites pas mais j’ai besoin de savoir si tu as subi d’autres types
de sévicesétant plus jeune ?
-
Comme quoi? Je demande sur la défensive en me
mordant l’intérieur de la joue pour avoir osé poser la question.
-
Comme des abus très grave, des abus
d’ordre sexuels comme les…
-
STOP!!! TAISEZ-VOUS!!!
L’expression de mon visage se fige
littéralement face à ces quelques mots… ces quelques mots qui peuvent tout
détruire en une fraction de seconde… détruire une relation de confiance…
détruire un couple uni… détruire une vie tout entière... La terreur pouvait
aisément se lire à travers les pupilles de mon regard océan sans que je n’aie
besoin de prononcer le moindre mot pour me justifier. Comme pour me protéger du
monde extérieur et environnant, je me suis assise tout en me recroquevillant
instinctivement en boule, ramenant minutieusement mes deux jambes contre mon
buste tout en posant machinalement ma tête sur mes genoux.
-
Non… pitié… je ne veux pas... je ne
veux pas revivre ça… ne m'obligez pas à me souvenir de ces moments cauchemardesques…
je ne veux pas revoir ce monstre même inconsciemment… je ne veux pas… pitié…
-
Doucement ma belle…
-
NE ME TOUCHER PAS!!!
ÉLOIGNEZ-VOUS DE MOI!!!
-
Calme-toi, je veux juste t’aider…
-
NON!!! ARRÊTEZ!!!
Ensuite, tout bascule en un seul instant.
En un instant je suis prise de vertiges,
des bourdonnements vrillent sans douceur dans ma tête et j’ai vraiment énormément
de difficulté à respirer correctement… s'en parler de mon muscle cardiaque qui ne
bât que trop rapidement ou au contraire parfois trop faiblement dans ma
poitrine tout en me faisant affreusement mal, comme si on me l’écrasait avec force.
La sensation est horriblement atroce. Allais-je
mourir? Lentement, j’ai l’impression de sombrer petit à petit dans
l’abysse. Tout semble ensuite s’arrêter de lui-même et pourtant mon corps tout
entier déraille davantage encore en se mettant à convulser dangereusement sur ce
lit d’hôpital.
-
Merde!
Le jeune médecin qui se trouve
toujours dans ma chambre ne tarde pas à réagir en se précipitant à la porte
afin de demander l'aide. Malgré mon état alarmant et critique, je reste
parfaitement consciente de ce qui se passe autour de moi. Je perçois deux
personnes qui rentrent précipitamment dans la pièce… deux femmes à en juger par
l’intonation de leur voix. Sans plus tarder, il leurs donne de nombreuses instructions
très précises. Je n’en comprends pas la moitié, ni même le quart, seulement une
ou deux phrases… peut-être trois au maximum. Des mains se posent de part et
d’autre de mon corps, ma tête est basculée vers l’arrière alors qu’on me met
comme un morceau de cuir dans la bouche… tout cela afin de me « maîtriser » et
me maintenir un maximum stable et allongé sur ce matelas pour ma propre
sécurité. « Tenez-la fermement! Elle ne doit plus pouvoir bouger pour ne
pas se faire de mal. » ne cesse-t-il de leur dire à plusieurs reprises.
-
Je suis sincèrement désolé…
Il dit me cela au moment où je ressens distinctement une 1ère piqûre d'une aiguille au niveau de mon bras gauche et la 2nde – à quelques secondes d’intervalles – au niveau de mon bras droit. Mon état revient progressivement à la normale. Toutes mes constantes se stabilisent d’elles-mêmes, mon corps ne convulse plus, mes diverses douleurs à la tête diminues tandis que ma respiration devient aussi calme et régulière que les battements de mon cœur. Je ne sais pas quel genre de liquide contenait ces deux seringues mais bizarrement, je me sens fatiguée… légère et apaisée… mais extrêmement fatiguée. Ouvrant légèrement mes yeux verts pour observer mon entourage, je ne distingue clairement que peu de chose tellement ma vision semble flou. La seule forme… enfin personne que je vois, c'est lui.
Lui qui est mon médecin.
Lui qui s’est assis sur mon lit tout près
de moi pour me rassurer.
Lui qui me caresse lentement la tête avec
beaucoup de douceur et d'affection.
Lui qui murmure tant de promesses à une
adolescente qu'il ne connaît pas.
Lui qui reste patiemment à mes côtés et veille tendrement sur moi jusqu’à ce que le sommeil me gagne paisiblement.
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